Campagne radio aux Etats-Unis : conseils stratégiques
The Planetary Group est une agence spécialisée dans la promotion auprès des radios universitaires, les émissions de découverte musicale ainsi que les radios non commerciales / AAA. Dans cette deuxième partie, Adam Lewis et Mike Clemenza d’IDOL vous expliquent pas à pas comment mener une campagne radio sur le territoire nord-américain.
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Le plan de communication
Adam Lewis conseille de commencer la campagne par les radios universitaires, car c’est le type de station qui offre le plus de soutien aux États-Unis : « Il y a toutes sortes de DJ, qui recherchent toutes sortes de musiques différentes ! Nous pouvons même promouvoir des albums en langue étrangère, mais dans ce cas, gardez en tête qu’ils n’ont pas besoin d’une énième version belge d’un groupe américain mainstream. Les critères c’est que la musique soit intéressante et de qualité. »
« Si vous voulez être diffusé sur les ondes de radios universitaires, vous devez envoyer à l’ensemble des 300 stations et assurer un suivi hebdomadaire, car leurs réunions éditoriales ont lieu toutes les semaines. Engager un professionnel vous permet de vous assurer que votre musique reste une priorité pour les radios », précise le promoteur musical.
L’ étape suivante se déroule auprès des radios non commerciales (ou non-comm), parmi lesquelles on retrouve les stations NPR, certaines des plus grandes stations universitaires et quelques stations amateurs. Par exemple, KCRW et KEXP sont des radios non-comm, qui dépendent du NACC et d’un classement non commercial distinct.
"Beaucoup de labels commettent l'erreur d'opter directement pour un format plus prestigieux"
« Beaucoup de labels commettent l’erreur d’opter directement pour un format plus prestigieux », alerte Adam Lewis. « Mais les radios non-comm sont généralement dirigées par des professionnels ayant travaillé pour des radios commerciales et qui ont besoin d’une raison pour passer votre disque. Les radios universitaires ne s’intéressent qu’à la musique, elles ne se soucient pas de votre label, de vos données, du nombre de streams ou de followers. Si elles aiment la musique, elles la diffusent.
C’est pourquoi il vous faut une base solide en radios universitaires avant de vous lancer dans une campagne non-comm. Après quoi, vous pouvez vous attaquer au format AAA – qui est un format plus mature – puis au Top 40. A chaque fois, ils vont tous vous demander encore plus de données, c’est pourquoi il faut procéder étape par étape ».
Parallèlement à l’étape des College radios (ou radios universitaires), vous pouvez également vous tourner vers des programmes spécialisés, comme les émissions de découverte musicale des radios commerciales. Elles sont d’un grand soutien et c’est le seul endroit où les programmateurs se permettent de prendre des risques.
Mike Clemenza, Sr. Director, Label Development and A&R pour IDOL, souligne également que ces émissions spécialisées représentent une réelle opportunité de développement. Certaines de ces émissions spécialisées sont diffusées sur des stations commerciales et donc touchent des marchés importants, elles représentent une chance rare pour la musique émergente d’atteindre le grand public. En plus de passer sur certaines stations commerciales, ce type d’émissions est aussi diffusée sur des stations affiliées à NPR (National Public Radio ou réseau de stations du service public) ou sur des radios non-comm, souvent le soir et le week-end, pour présenter de nouveaux artistes.
Dans le dédale des College radios
Le paysage radiophonique américain peut être intimidant de par sa taille, son étendue et son coût. « Il y a 600 stations de radio universitaires aux États-Unis, mais vous ne voulez envoyer vos messages qu’aux 300 stations qui sont recensées par le classement NACC. Ainsi, vous savez combien de fois vous passez à l’antenne et quelles sont les chansons choisies par les DJ. Cela vous permet de réduire petit à petit le nombre de stations à 30 ou 20, ce qui donne une idée de territoires sur lesquels vous pouvez concentrer vos efforts et permet de mieux cibler vos campagnes de pub sur les réseaux sociaux », conseille Adam Lewis.
« Le classement NACC est un classement basé sur les albums ou les EP », poursuit le promoteur musical. « Envoyer trop de singles affaiblit la performance de l’album dans le classement général. Mais l’avantage, c’est qu’avec le format album, vous pouvez créer un lien avec un artiste plutôt qu’avec une chanson, c’est plus durable. »
Le timing est essentiel
« Pour les radios universitaires, un album reste d’actualité jusqu’à deux mois après sa sortie environ », explique Adam Lewis. « Contrairement à une campagne Spotify où l’on sort un nouveau titre par mois, il faut choisir un single qui sera le point d’orgue de la campagne. Une fois l’album sorti, nous pouvons suggérer d’autres titres. Mais il ne faut pas envoyer trop de singles aux College radios : les programmateurs veulent découvrir les meilleurs titres par eux-mêmes.”
Il n’est pas nécessaire de faire coïncider la diffusion en radio avec la date de sortie de l’album ; la campagne peut se faire au fur et à mesure que le projet prend de l’ampleur. Par exemple, si une chanson devient virale et que vous obtenez des playlists importantes, vous pouvez décider d’augmenter le budget.
« Si une station vous a soutenu – à condition qu’il ne se soit pas écoulé trop de temps – les programmateurs se souviendront d’un album à l’autre de cet artiste comme d’un artiste clé de la radio. Pour maintenir leur intérêt, vous pouvez, sans vous lancer dans une campagne complète, envoyer une édition live ou un single supplémentaire en exclusivité, cela aide à se rappeler au bon souvenir de la station », recommande Adam Lewis.
Faut-il combiner campagne radio et tournée ?
« C’est une erreur de penser qu’il faut planifier une tournée américaine avant de mener une campagne radio universitaire », prévient Adam Lewis. « Il s’agit plutôt de planter des graines pour voir comment les gens réagissent, ce qui peut aider par la suite à construire une tournée. Ensuite, lorsque vous arrivez aux États-Unis pour votre deuxième album, vous ne partez pas de zéro. C’est pourquoi il faut toujours avoir un plan de 18 à 24 mois avant de partir en tournée aux États-Unis.
« Bien sûr, si vous partez en tournée, nous pouvons promouvoir ces concerts », poursuit le fondateur de The Planetary Group, « mais c’est beaucoup plus facile si la station a déjà joué votre disque auparavant. Imaginez que vous ayez un concert à Chicago, mais que la station de radio déteste ce disque ? Vous avez toujours la salle à remplir et cette station ne vous y aidera pas. Il est préférable d’obtenir d’abord un grand nombre de diffusions, de découvrir les meilleurs marchés pour ce projet et ainsi définir où le booker peut obtenir des dates de concert ».
Mike Clemenza ajoute : « Je travaille souvent avec des équipes internationales qui se lancent dans des campagnes radio aux Etats-Unis pour la première fois. C’est vrai que si vous avez le budget, cela ne fait jamais de mal de planter des graines pour localiser les premiers fans. Cela ne peut que vous aider à construire une fanbase solide. Toutefois, si les fonds sont limités, il serait plus efficace de planifier les dépenses en fonction d’un plan adapté au marché. Demandez-vous si vous êtes prêt à fournir de nouveaux éléments après la sortie de l’album pour maintenir l’intérêt des stations. Si vous obtenez un soutien important, est-il prévu de faire une tournée sur le territoire ? Etes-vous prêt à promouvoir de nouveaux contenus sur les territoires intéressés et de vous engager sur la durée auprès de ces nouveaux fans ? C’est bien d’avoir une liste des stations qui ont soutenu le projet, mais c’est aussi bien d’avoir des retours de différents territoires, ce qui permettrait d’amorcer un changement et de positionner l’artiste de manière pérenne sur le marché.”
Comment percer : le pouvoir des College radios
Cela doit se faire progressivement, mais le plus important est de construire une base solide. Les College radios diffusent essentiellement des nouveautés, ce qui signifie qu’après un mois, la chanson n’est plus inédite et les programmateurs passent à autre chose. Sur les radios commerciales, vous dépendez du succès de votre dernier tube, alors que les radios universitaires ne vous abandonneront pas : elles passeront plusieurs morceaux, dans différents types d’émissions. Et tant que vous continuez à produire de la musique de qualité, elles vous soutiendront sur la sortie de votre prochain album.