
Substack et la musique : comment réussir sa stratégie
Comme le souligne l’article ‘The Many Layers of Fandom’ de by Laura Fisher sur Midia Research, les vrais fans veulent des expériences riches et continues qui récompensent leur curiosité et leur participation active. Le format narratif de Substack nourrit parfaitement ces superfans, en permettant aux créateurs de partager des récits longs, des informations exclusives et des liens personnels qui favorisent une loyauté durable. En privilégiant l’exploration et la communauté plutôt que la simple consommation, Substack devient un refuge pour ceux qui aspirent à s’engager, à interagir et à s’investir profondément dans les histoires et les créateurs qu’ils suivent.
Après avoir exploré les principales fonctionnalités de la plateforme et démontré comment Substack s’est imposé dans le paysage musical, ce deuxième volet va s’intéresser aux questions pratiques. À travers exemples et conseils, David Percy, Deputy Head of Audience Development chez IDOL, décortique les bonnes pratiques qui permettent aux artistes et labels de fédérer une audience fidèle, d’animer le dialogue avec ce public plein de promesses.
Place cette fois aux retours d’expérience concrets, aux stratégies personnalisées et aux astuces pour construire et faire grandir sa communauté.
Comment s’y prendre concrètement pour créer une communauté sur Substack ?
Il y a forcément du trafic qui vient des réseaux sociaux. Si l’artiste a une grande audience sur Instagram, on aura tendance à la diriger vers Substack, par exemple en mettant le lien dans la bio ou en réservant certains contenus exclusifs sur Substack pour inciter à l’abonnement. Mais Substack offre aussi la possibilité de faire des découvertes directement sur la plateforme.
Ce qui marche bien, c’est ce système de feed qui permet de chercher de nouveaux artistes ou de nouveaux contenus. Substack propose un onglet “explore” qui donne vraiment la main à l’utilisateur. Ce n’est pas comme sur TikTok ou Instagram, où le feed vertical finit vite par proposer des contenus biaisés par l’algorithme, et sur lequel on ne retrouve plus du tout les comptes auxquels on s’était abonné. Sur Substack, le fil de découverte et le fil réservé aux comptes suivis sont clairement distincts.
Avec l’onglet explore, c’est l’utilisateur qui choisit : on peut filtrer par thèmes, par nouvelles tendances, par catégorie (culture, tech, politique, food, etc.), donc on devient acteur de sa propre découverte, un peu comme dans un média. Je pense que ça plaît beaucoup à ceux qui en ont marre du scroll infini sur les autres réseaux.
Quelles sont les features recommandées pour générer l’échange entre fans et artistes ?
Sur Substack, c’est super simple d’entrer en contact avec sa fanbase. Comme sur plein d’autres plateformes, il y a un chat pour envoyer des messages directs à ses abonnés. Mais il y a aussi un onglet “activité”, qui ressemble un peu au feed Instagram ou Twitter : on peut mettre en avant ses propres publications et ceux d’autres comptes, notamment des fans, et voir toutes les interactions en un seul endroit. Ça permet vraiment de valoriser et d’animer la fanbase.
Il y a aussi les chat rooms : on peut créer des espaces d’échange, réservés aux abonnés payants, où tout le monde peut discuter en même temps, sur des thèmes particuliers. C’est un peu comme d’avoir un mini-Discord intégré à son espace Substack. On décide si ces threads sont accessibles à tous ou seulement à certains abonnés, en fonction des différents niveaux de paiement par exemple.
Et bien sûr, en parallèle, il y a la newsletter et les contenus exclusifs qui permettent de garder un lien direct et privilégié avec les superfans.
Globalement, on garde la main sur tout, avec plein d’outils pour créer une vraie dynamique de communauté : discussions, threads, et différents espaces d’échange entre fans.
Existe-t-il des bonnes pratiques de publication ?
Pour réussir sur Substack, il vaut mieux commencer par offrir quelque chose qui a vraiment de la valeur, même dans les contenus gratuits : des aperçus exclusifs, des moments en coulisse, des anecdotes sur le processus créatif… Et ce qui marche le mieux, c’est d’être authentique, car ça permet de créer une vraie relation de confiance avec son audience.
Il faut aussi publier régulièrement. Peu importe la périodicité, l’important c’est d’être cohérent, même si c’est toutes les deux semaines ou une fois par mois. Et varier les formats, avec des extraits audio, des images, des vidéos….
Si on décide de proposer plusieurs types de contenu (gratuit, payant, tutos, annonces de sorties…), il faudra penser à organiser la page pour que chacun puisse suivre ce qui l’intéresse. Je recommande d’utiliser les fonctions de découverte : placer des mots clés sur des titres marquants, recommander d’autres profils Substack, participer à la communauté, et ne pas hésiter à demander aux autres une recommandation, car toutes ces actions vont aider à élargir la fanbase.
Enfin, ne pas négliger de vérifier les analytics pour voir les types de publications qui fonctionnent, les taux d’ouverture, ce qui suscite le plus d’engagement, ce qui déclenche des abonnements ou des ventes… Tout ça va servir à ajuster les contenus proposés pour satisfaire la communauté.
La partie payante, elle, demande vraiment du travail en amont : il faut déjà avoir prouvé la valeur du contenu gratuit et avoir une base solide, avant de demander aux gens de franchir le cap et de s’abonner.
Quels pièges fréquents à éviter et comment les contourner ?
La première chose à respecter c’est d’éviter de faire uniquement de la promo ou de ne poster que des annonces . Si chaque post, c’est juste “achetez mon merch, écoutez mon nouveau single, voilà mes dates de tournée”, les gens vont vite se désabonner. Il faut varier, apporter de la valeur, raconter des histoires, partager de l’inspiration, de l’art…
Côté monétisation, il ne faut pas se précipiter. Il faut proposer du contenu gratuit, faire découvrir son univers d’abord, puis proposer petit à petit du contenu payant ou des bonus. Si l’audience gratuite grandit bien, ça signifie que le contenu est assez solide pour passer à du payant. Si tout est verrouillé dès le début, ça risque de freiner la croissance de la communauté. L’idée c’est de tester, ajuster, et d’avancer à son rythme.
Il ne faut surtout pas oublier la partie newsletter : c’est tentant de tout miser sur les posts web ou les réseaux sociaux, mais la vraie force de Substack, c’est que les contenus arrivent directement dans la boîte mail des gens.
Sur Substack, il est facile de se disperser. Il vaut mieux poster moins, mais se concentrer sur des contenus solides que de vouloir tout faire à la fois et finir par bâcler ses publications. Attention aussi à la qualité technique : même si l’authenticité compte, des posts mal formatés, de l’audio qui bug, des images de mauvaise qualité, ça fragilise la crédibilité.
Il ne faut pas non plus ignorer les retours des lecteurs. Les commentaires, les messages, ce sont de superbes occasions de comprendre ce qui marche ou pas, d’ajuster le contenu, et de renforcer le lien avec ta communauté.
Enfin, il ne faut pas tout miser sur Substack ! Ça reste un outil comme un autre, il faut aussi maintenir une présence sur les plateformes de streaming et les réseaux sociaux. Tout fait partie de l’écosystème, c’est ce qui donne de la force à la stratégie globale du projet.
Quels exemples inspirants de pages musique/labels illustrent bien les bonnes pratiques aujourd’hui ?
Les artistes présents sur la plateforme sont plutôt des figures “vintage” ou alors des artistes alternatifs très “cool kid” mais pas forcément grands public / pop. S’ils utilisent Substack, c’est parce que ces artistes avaient besoin de se créer un espace d’expression qu’ils n’auraient pas eu autrement. Les artistes très mainstream n’en ont pas forcément besoin, ils ont déjà tous les canaux classiques à disposition.
Depuis plusieurs années déjà Patti Smith utilise sa page comme un véritable hub : elle y partage des sortes de journaux intimes, des essais, des vidéos, des photos qu’elles commente, ce qui crée une expérience très personnelle et immersive.
Laura Marling, elle, adopte une approche un peu à la Twitter : des messages courts, réguliers, avec beaucoup d’échanges directs, ce qui rend sa page super vivante. We Are Scientists, eux, ont une page pensée comme un vrai journal : très éditorialisé, comme un magazine sur leur actualité et leurs réflexions.
Côté artistes plus émergents ou alternatifs, Sessa de chez Mexican Summer vient tout juste de se lancer mais en quelques semaines il a déjà 1500 abonnés, donc c’est un profil à suivre ! Il y a aussi Lucky Break qui est chez Fire, qui s’en sert carrément comme journal de bord.
Bref, il y a plein de façons d’utiliser Substack : journal intime, fil d’actu, espace multimédia, et chacun adapte à son univers et à ses envies de partage.