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09.02.24

Job of the Month #15 : Présidente et dirigeante

Nouvel épisode de notre série Job of the Month pour découvrir les multiples facettes de l’industrie de la musique. Ce mois-ci, Clarisse Arnou, aux manettes de l’UPFI, de Yotanka et de Intuitive Records.

Chaque mois, IDOL présente un métier de l’industrie de la musique. Ou plus qu’un métier, une personne ! Car derrière un même intitulé de poste, on retrouve des différences significatives d’une structure à une autre. Chacun peut définir, selon son parcours professionnel, ses qualités et compétences le périmètre de son poste! Rencontre avec Clarisse Arnou, qui a plusieurs casquettes. Elle nous répond en tant que présidente de l’UPFI et dirigeante des labels Yotanka et Intuitive Records.

Tout d'abord, peux-tu expliquer ce que fait l’UPFI ?

L’UPFI est la principale organisation représentative des producteurs et distributeurs phonographiques indépendants français. Elle défend les intérêts des labels de toutes tailles (TPE, PME et ETI) auprès de la filière musicale, des pouvoirs publics et du grand public. Son objectif est de faire rayonner la création française dans toute sa diversité et de favoriser son financement. Chaque label est unique mais, collectivement, les « indés » incarnent la richesse musicale française et la force de notre tissu de production. L’UPFI est une des organisations qui fait entendre cette voix.

Que fait une présidente d'organisation telle que l'UPFI ?

J’ai été élue présidente de l’UPFI en 2022, l’occasion pour moi de combiner mon rôle de dirigeante de labels indépendants (Yotanka, Intuitive) avec des enjeux portés vers l’intérêt général. Ces deux réalités sont très connectées et il s’agit pour moi de porter les sujets qui me semblent déterminants pour la filière, pour le futur de nos entreprises, tout en incarnant une forme de renouvellement et d’ouverture. En effet, en tant que première femme présidente de l’histoire du syndicat, j’espère pouvoir montrer que chacun et chacune a sa place dans nos discussions.

Plus concrètement, nous travaillons avec les pouvoirs publics, les autres organisations, ainsi que tous les acteurs de la filière sur des sujets très variés, comme le financement de la filière au travers des crédits d’impôt, l’ambition et les programmes du Centre National de la Musique, mais aussi les enjeux liés au partage de la valeur, à l’évolution du modèle de rémunération du streaming, la protection des droits voisins à l’heure de l’IA, etc.

Peux-tu nous en dire plus sur ton rôle de dirigeante des labels Yotanka et Intuitive ?

Yotanka est un label et éditeur indépendant, que nous avons ‘refondé’ avec mon associé Vivien Gouery, il y a plus de 10 ans. Son histoire est ancrée à l’ouest, entre Angers (ma ville de cœur) où se situe le siège social, et Nantes où se trouve le bureau principal et l’équipe désormais.

Il y a 8 ans, l’artiste Thylacine m’a également sollicitée pour son management, puis nous nous sommes associés au sein d’Intuitive Records, société qui produit l’ensemble des projets gravitant autour de Thylacine. La structure a évolué et est également désormais un studio de production musique & image basé à Belleville.

Comment s’organise ton travail au quotidien ?

Je partage mon temps entre Nantes, Angers, et Paris – en jonglant entre mes différents rôles et projets, au contact des équipes respectives, artistes, et au gré des concerts et évènements professionnels.

J’aime le mouvement, heureusement, car aucune semaine ne se ressemble. Comme beaucoup, j’ai mon laptop toujours sur moi, pour passer d’un bureau à un autre, de façon à rester productive malgré les nombreux déplacements.

Quelles sont les qualités requises pour tes postes ?

Pour ce genre de job en tout cas il faut de l’engagement et de la détermination, pour commencer.
De l’énergie, et de l’endurance, ensuite.

En ce qui me concerne, j’ai toujours beaucoup aimé débattre, écouter, analyser et convaincre. Fédérer autour d’un projet, d’une idée, d’un objectif commun est plutôt réjouissant.

Je ne suis pas de nature très patiente, et pourtant il faut l’être quand on fait du développement d’artistes, et de carrière.

La prise de risque fait partie de la vie d’entrepreneu·r·se aussi donc c’est une caractéristique importante et qui jalonne chaque parcours.

Quel a été ton parcours professionnel ?

Mon master en poche (cursus communication et éco-gestion appliquée aux industries culturelles), j’ai débuté auprès du groupe Lo’Jo en tant que manageuse. J’ai appris toutes les facettes de ce métier de l’édition à la production d’albums, de spectacles, de tournées à l’étranger, etc. Ce fut des années très denses, et riches de découvertes, d’apprentissages, avec beaucoup de voyages en tournée partout dans le monde.
A mon sens, il n’y a pas de meilleure école pour apprendre / comprendre.

J’ai ensuite additionné les missions au fil des opportunités. Yotanka d’abord, puis Thylacine.
Le rôle de label et d’éditeur s’est imposé comme mon cœur de métier.
Le management m’a toujours permis de conserver une vision très globale des enjeux du développement de carrière.

Investir un peu de mon temps pour l’intérêt général a été naturel ensuite, l’UPFI bien sûr mais avant cela déjà avec MEWEM où j’ai mentoré pendant 3 ans des jeunes entrepreneuses de l’industrie musicale – sujet qui m’importe beaucoup. Le mentorat est un outil ultra efficace et concret. Je suis toujours aujourd’hui dans le CA de MEWEM, dont le projet et le réseau se développent à grande vitesse. Tant mieux car le besoin reste grand et les progrès en matière d’égalité des genre, trop lents.

Qu'est-ce que tu aimes dans ton travail ?

J’ai toujours aimé cumuler différents rôles, une façon de déjouer toute forme de routine, et de multiplier les expériences. C’est enrichissant d’avoir à faire à plusieurs équipes, entourages, organisations. Tout cela est très complémentaire, bien que légèrement schizophrénique parfois.

J’aime aussi être au plus proche du créatif et voir les projets évoluer, rencontrer leur public. C’est un métier de patience et de conviction, mais quand tu vois les projets, albums, artistes passer des caps, cela donne vraiment la foi.

Quel est ton lien avec IDOL ?

La société Intuitive est distribuée par IDOL, donc nous travaillons ensemble à toutes les sorties qui concernent Thylacine.

Pascal Bittard est aussi membre du conseil d’administration de l’UPFI, donc nous menons des réflexions autour d’enjeux communs, liés à la distribution digitale ou au modèle de rémunération du streaming par exemple.

Quelle est la tâche la plus étrange que tu as pu faire au cours de ta carrière ?

J’ai passé un long moment à discuter ‘chars russes’ …. pour la production du clip ‘War Dance’ de Thylacine il y a 6 ans. Je me souviens de mes collègues de bureau qui hallucinaient dans l’open space…

Dans ce clip, l’idée était de montrer les manœuvres de la Russie dont les chars étaient positionnés à la frontière ukrainienne, et où les militaires, pour tuer l’ennui, orchestraient des chorégraphies de chars sur le terrain.

Ce clip était une façon de dénoncer les conséquences dramatiques de ce conflit latent, comme l’interlude en milieu de clip dans un hôpital de guerre en témoigne.

Ce fut une production très compliquée et coûteuse, dont les images devaient être tournées en Russie, qui avait fini par interdire l’accès de l’équipe au territoire. Au final, une partie des images a dû être réalisée sur une base militaire anglaise.

La playlist de Clarisse

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