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18.06.25

Job of the Month #23 : Community & Projects Manager

Nouvel épisode de notre série Job of the Month pour découvrir les multiples facettes de l’industrie de la musique. Ce mois-ci, Nerea Serrano, Community & Projects Manager pour WIN.

Chaque mois, IDOL présente un métier de l’industrie de la musique. Ou plus qu’un métier, une personne ! Car derrière un même intitulé de poste, on retrouve des différences significatives d’une structure à une autre. Chacun peut définir, selon son parcours professionnel, ses qualités et compétences le périmètre de son poste! Rencontre avec Nerea Serrano, qui nous parle de son rôle aux multiples facettes chez WIN, réseau professionnel d’associations indépendantes du secteur de la musique.

Tout d'abord, peux-tu présenter WIN ?

WIN (Worldwide Independent Network) est l’organisation mondiale qui connecte et développe les associations professionnelles de musique indépendante. Nous rassemblons la communauté et soutenons les associations professionnelles représentant des milliers d’entreprises indépendantes dans le monde entier. Nous participons à instaurer un écosystème musical équitable, transparent et diversifié avec un accès complet au marché et des opportunités pour tous.

Que fait un Community & Projects Manager ?

Je suis le principal point de contact pour notre réseau de 37 associations professionnelles, représentant plus de 8 000 entreprises à travers l’Amérique du Nord et du Sud, l’Europe, l’Asie et l’Australasie. Je les soutiens en partageant des mises à jour sur notre travail et les réalisations des membres et en facilitant l’accès aux ressources et opportunités. Cela peut être des envois d’informations réguliers par e-mail et notre newsletter mensuelle comme un soutien personnalisé chaque fois qu’ils ont besoin d’informations ou d’aide.

Nous offrons des avantages tels que des réductions sur les pass de grandes conférences internationales – telles que Music Biz, A2IM Indie Week, Reeperbahn, ADE et The Great Escape – pour aider notre communauté à rester connectée et visible sur la scène mondiale. Soutenir notre réseau de toutes les manières possibles est un élément clé de notre mission.

Je gère également le programme WIN Supporters, que nous avons lancé pour les entreprises qui souhaitent défendre le secteur mondial de la musique indépendante et s’engager activement avec notre réseau d’associations professionnelles. Je travaille en étroite collaboration avec les soutiens potentiels pour leur présenter la mission et les valeurs de WIN. Une fois adhérents, je les aide à partager leurs services avec nos associations et, par extension, leurs membres, en veillant à ce que leurs contributions apportent une réelle valeur à la communauté.

Au-delà de l’engagement communautaire, je supervise également la communication et les relations publiques pour m’assurer que notre message soit cohérent et aligné avec notre mission. Du côté des projets, je gère deux initiatives clés : WINHUB, notre programme de networking international, conçu pour favoriser les connexions mondiales et les opportunités commerciales grâce à des événements en ligne et en physique. Je gère aussi le WINCON, notre conférence annuelle qui rassemble nos associations professionnelles et les membres du conseil d’administration pour un événement collaboratif.

En somme, mon rôle consiste à construire une communauté, à créer de la valeur pour nos membres et à veiller à ce que le secteur de la musique indépendante reste connecté, informé et soutenu.

Quelles sont les qualités requises pour ton poste ?

Pour moi, il s’agit moins d’être hyper-organisée que de savoir prioriser. La capacité à être multitâche est essentielle – pouvoir jongler entre différents domaines de travail tout en identifiant clairement ce qui doit être fait en premier afin de débloquer d’autres tâches. Il faut rester concentrée, flexible et stratégique.

De solides compétences en communication sont également nécessaires. Dans ce rôle, j’interagis avec un large éventail d’interlocuteurs – de nos associations membres aux entreprises intéressées à rejoindre le programme des Soutiens de WIN, ainsi que des partenaires impliqués dans nos différents projets. Il est important de faire de la place pour la voix de chacun, en particulier dans un réseau mondial qui s’étend de l’Amérique du Nord et du Sud, à l’Europe, l’Asie et l’Australasie. Comprendre les différences culturelles, s’assurer que les voix plus discrètes et les petits marchés sont également entendus – ce type de sensibilité est essentiel pour maintenir le réseau inclusif et collaboratif.

L’attention aux détails est une autre compétence capitale, surtout quand il s’agit de la planification d’événements. Travailler sur des événements internationaux, souvent sans être sur place jusqu’à la toute dernière minute, demande beaucoup de ressources. Il faut savoir anticiper les problèmes et trouver des solutions à distance, souvent dans un temps limité.

En fin de compte, ce qui relie tout cela, c’est une véritable envie de créer une communauté mondiale au service de la musique indépendante. C’est ce qui me motive au quotidien et donne un sens à mon travail.

Quel a été ton parcours professionnel ?

J’ai grandi à Valence, en Espagne, et j’ai fréquenté une école américaine où j’ai obtenu le Baccalauréat International. C’est là que je suis tombée amoureuse de la littérature – en particulier de la littérature nord-américaine – ce qui m’a conduit à poursuivre des études d’anglais à l’université, avec l’objectif initial de devenir professeur dans l’enseignement supérieur.

En même temps, la musique prenait déjà une large place dans ma vie. Depuis mes 14 ans environ, je jouais dans des groupes, organisais des concerts dans ma ville natale, écrivais dans le magazine musical national espagnol Mondo Sonoro, et cherchais des moyens de partir en tournée avec des artistes que j’admirais. Avec le temps, j’ai réalisé que la musique n’était pas seulement une passion – c’était un domaine dans lequel j’avais envie d’évoluer professionnellement.

Ce changement m’a conduite à Madrid, où j’ai obtenu un Master en Gestion Culturelle (avec mention très bien). Pendant mes études, j’ai travaillé pour un label local, Acuarela, et j’ai fait des tournées avec des groupes internationaux comme Julie Doiron et Early Day Miners. J’ai également effectué un stage auprès de l’association professionnelle espagnole UFi, aidant à organiser les Prix de la Musique Indépendante Espagnole (Premios MIN), que j’ai fini par coordonner pendant trois ans – y compris l’édition 2020 marquée par le COVID, que nous avons adaptée en un événement diffusé sur la chaîne télé Movistar.

En 2021, je travaillais simultanément pour UFi et WIN. Finalement, début 2023, j’ai pris la décision de me concentrer entièrement sur WIN, et depuis, je me consacre avec bonheur à ce rôle.

Qu'est-ce qui t’a motivée à travailler dans l'industrie musicale pour soutenir les artistes indépendants, et qu'est-ce qui t’a conduit à WIN ?

Le travail accompli par les labels indépendants m’impressionne énormément. Bien sûr, j’écoute de la musique produite par les majors, mais beaucoup de mes artistes préférés sont défendus par des personnes que j’ai maintenant le privilège de connaître et avec qui j’ai la chance de collaborer – qu’ils soient au conseil d’administration de WIN ou des professionnels avec lesquels je noue des relations lors d’événements de l’industrie.

Faire partie d’une organisation qui connecte cette communauté mondiale et qui travaille à uniformiser les règles du jeu pour les indépendants a une signification profonde pour moi. Il s’agit d’ouvrir l’accès aux marchés, de plaider pour des opportunités plus équitables et de veiller à ce que les artistes aient de véritables options quant à la façon de sortir leur musique. Avoir un large éventail de labels indépendants signifie plus de choix pour les artistes. Et quand ces labels se réunissent à travers des associations professionnelles, ils définissent collectivement ce que nous considérons comme des règles justes et équitables pour l’ensemble de l’industrie.

Ces labels sont aussi de véritables investisseurs dans les nouveaux talents. Contrairement aux majors, qui s’appuient souvent fortement sur les données pour parier plus sûr, les indépendants prennent des risques créatifs et nourrissent les voix émergentes. En tant que fan de football, je pense souvent aux labels indépendants comme à des centres de formation : ils ne se contentent pas de découvrir les stars de demain, ils les développent aussi. Certains artistes rejoignent plus tard des majors, mais beaucoup choisissent de rester indépendants où ils jouissent d’une plus grande liberté artistique.

J’aime que cet écosystème existe. Quand je regarde les nommés et les gagnants des Libera Awards ou d’autres prix de la musique indépendante, je suis heureuse de voir mes albums préférés, mes artistes préférés.

Comment se déroule une journée type pour toi ?

Nous sommes une petite équipe de trois, donc bien que j’aie mes propres missions, je participe aussi aux autres projets. Pour comprendre à quoi ressemble mon quotidien, il est en fait plus utile de regarder comment chaque semaine débute.

Nous commençons chaque semaine, avant même d’ouvrir nos boîtes mail, par une réunion d’équipe pour examiner les tâches accomplies et établir les priorités. Après quoi, je trie mes e-mails, j’identifie les problèmes urgents et j’organise mes tâches en conséquence. Bien que j’essaie de travailler sur les sujets un par un, avec une charge de travail aussi dynamique,ça implique toujours un peu de jonglage. Je reste particulièrement attentive à tout ce qui pourrait bloquer mes collègues ou les membres du conseil d’administration, en donnant la priorité à ces tâches pour que les projets puissent avancer.

Voilà un aperçu de ce à quoi ressemble une journée à mon bureau. Une grande partie de mon temps est passée sur Zoom, car nos membres sont répartis dans le monde entier. Je n’ai pas d’horaire fixe – les appels avec l’Asie ont lieu le matin, et les réunions avec les États-Unis ont souvent lieu l’après-midi ou le soir. Nos réunions du conseil d’administration, à certaines périodes de l’année, peuvent même avoir lieu à 22 heures.

Les voyages sont un autre aspect important de mon rôle. Nous sommes attentifs au développement durable et nous nous assurons que chaque voyage est utile, à la fois en termes d’impact sur l’environnement et de temps passé. Il est essentiel de garder un équilibre entre présence et disponibilité. Cela dit, j’assiste généralement à l’Indie Week à New York, au Reeperbahn en Allemagne, et selon les priorités de l’année, à d’autres événements – nous sommes récemment allés au Mexique, à Zagreb et à Belgrade, où nous avons tenu notre conférence annuelle. Cet automne semble particulièrement chargé en voyages, ce qui est excitant, car cela signifie plus de contacts en personne avec notre réseau mondial.

Qu'est-ce qui te plaît dans ton travail ?

Les voyages sont certainement l’un des points forts de mon travail – un aspect que j’apprécie particulièrement. J’ai toujours aimé découvrir de nouveaux endroits et rencontrer de nouvelles personnes. Je suis quelqu’un qui aime beaucoup les gens, et cela me rend heureuse de nouer des amitiés et des relations dans le monde entier.

Les relations que j’ai nouées dans la communauté de la musique indépendante sont ce qui rend ce travail vraiment spécial. C’est un tel privilège de connaître les personnes qui se cachent derrière la musique que j’aime – celles qui sortent mes disques préférés et qui travaillent avec une vraie passion et un vrai but.

Il y a aussi de petits avantages, comme être invitée à des concerts ou entendre des albums avant leur sortie. Et quand vous voyagez pour le loisir, il est possible que vous connaissiez déjà quelqu’un sur place, qui pourra vous faire visiter – c’est une joie en soi. Je me sens incroyablement chanceuse de faire partie d’une communauté aussi passionnée et connectée.

Quel est ton lien avec IDOL ?

IDOL est lié à WIN grâce à son implication active dans plusieurs de nos associations membres. Le fondateur Pascal Bittard siège au conseil d’administration de l’UPFI, et IDOL est membre associé de l’A2IM aux États-Unis, de l’AIM au Royaume-Uni et de la FELIN en France. Ainsi, bien qu’IDOL ne soit pas un membre direct de WIN, il fait partie intégrante du réseau grâce à son engagement dans ces associations nationales.

Nous sommes également très heureux d’avoir accueilli Labelcamp dans notre programme de Soutiens de WIN conçu pour les entreprises qui souhaitent soutenir la communauté indépendante, et montrer leur engagement à travailler en tant qu’acteurs du changement.

Quelle est la tâche la plus étrange que tu as pu faire dans ta carrière ?

L’un des moments les plus mémorables a été lors de notre soirée sur le bateau WINHUB à New York, il y a quelques années. On ne s’attend généralement pas à ce que l’organisation d’un événement sur bateau en juin à New York représente un défi particulier, mais cette année-là, les feux de forêt canadiens venaient de frapper, et la ville était couverte de fumée. Puis, les choses se sont corsées : pendant les balances, une tempête a rendu l’Hudson incroyablement agitée. Angelica García, qui se produisait pour Partisan Records, a commencé à avoir le mal de mer – et elle n’était pas la seule !

Heureusement, nous avons pu obtenir des médicaments contre le mal de mer. Notre PDG a fait une blague pendant son discours, en lançant : « Nerea a des pilules pour tout le monde ! », ce qui a largement fait rire. Donc oui, distribuer de la Dramamine sur un bateau qui tangue au milieu de l’Hudson River se classe certainement comme l’un des moments de mon travail les plus inattendus !

La playlist de Nerea

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